Le Sacrement de l'onction des malades


"Le Seigneur essuiera les larmes sur tous les visages." (Isaïe 25,8)

L'épreuve de la maladie
La maladie et la souffrance marquent la vie de tout homme, souvent de manière très aiguë, au point de pouvoir conduire à la révolte ou au désespoir. Par ailleurs le grand âge comporte souvent des handicaps qui s'apparentent à la maladie. L'épreuve de la maladie favorise le souvenir des expériences et des choix qui ont marqué la vie. Elle peut raviver parfois le sentiment des erreurs commises et de leurs conséquences. Elle ouvre souvent sur une angoisse concernant le jour et l'heure de la fin. Le croyant s'interroge sur la fidélité de sa vie à l'Évangile. Il peut en venir à douter de la miséricorde de Dieu et de la vie éternelle. Nul n'est assuré de sa persévérance finale dans la foi, l’espérance et la charité. Devant ces épreuves le Christ ne laisse pas ses fidèles démunis. Pour son Église et ceux qu'elle sert, il a voulu le sacrement de sa compassion.

Pour beaucoup d'entre nous, le sacrement de l'onction des malades reste encore le sacrement de l'extrême-onction, celui qui est donné au moment du dernier passage; et, par voie de conséquence, nous avons peur de le demander, comme si le recevoir allait signifier notre mort prochaine.

Or ce sacrement n'est pas celui de la mort, mais de la vie ; il est, comme tout sacrement, signe du salut que Dieu nous offre. Il est destiné aux personnes malades, à celles qui vont subir une opération ou dont les infirmités rendent la vie plus difficile et qui demandent à Dieu la guérison, la force dans les épreuves, la foi dans les moments de doute, l'espérance devant les risques de découragement et aussi le pardon des péchés.

Le sacrement des malades est préparé et proposé chaque année au cours d’une messe dominicale, mais on peut aussi en faire la demande pour en recevoir la force face à la maladie (ce sacrement peut aussi être célébré chez la personne qui le demande). Il peut être reçu plusieurs fois dans la vie.

Ne nous privons pas de ce cadeau de Dieu Proposons-le, avec doigté, aux personnes de notre entourage!

Un peu d'histoire

Mettons nous à l'école de saint Jacques (5, 14-16) "Si l'un de vous est malade, qu'il appelle ceux qui exercent dans l'Église la fonction d'Anciens [Prêtres] : ils prieront sur lui après lui avoir fait une onction d'huile au nom du Seigneur. Cette prière inspirée par la foi sauvera le malade le Seigneur le relèvera et, s'il a commis des péchés, il recevra le pardon. Reconnaissez vos péchés les uns devant les autres, et priez les uns pour les autres afin d'être guéris, car la supplication du juste agit avec beaucoup de puissance.." Dans ce texte de l'Écriture se trouvent déjà mentionnés les rites principaux du sacrement : la prière, l'imposition des mains et l'onction d'huile par le prêtre (s'y ajoute l'écoute de la Parole de Dieu), en même temps que les effets du sacrement…. Le sacrement de l'onction des malades est par excellence le sacrement de la miséricorde, de la “compassion” du Christ et de l'Église. Le Christ, qui “a connu l'épreuve comme nous, et n'a pas péché” (He 4, 15), a témoigné d'une compassion toute particulière pour les malades et tous ceux qui étaient atteints par la souffrance physique. Annonçant la Bonne Nouvelle du salut, il guérissait ceux qui venaient à lui (cf. Mt 9,35 ; 14,35-36). Homme des douleurs, il a porté toutes les souffrances des hommes et c'est grâce aux blessures de sa passion qu'il apporte la guérison (cf. Is 53). Son attitude en face de la souffrance et de la mort, il veut qu'elle soit aussi celle de ses disciples. “Guérissez les malades” leur ordonne-t-il en les envoyant en mission (cf. Mt 10,8). Et, de fait, “ils chassaient beaucoup de démons, faisaient des onctions d'huile à de nombreux malades, et les guérissaient” (Mc 6,l3). Dans l'onction des malades. le Christ associe, comme il le faisait durant sa vie terrestre, le souci du bien des corps et celui des biens spirituels. C'est pourquoi ce sacrement est un sacrement de guérison. Guérison intérieure d'abord, des angoisses, des doutes et des déchirements qu'apporte toute maladie grave ou une blessure corporelle sérieuse. Guérison physique aussi parfois, car le Christ est toujours agissant dans son Corps qui est l'Eglise. Le prêtre, en faisant l'onction, dit au malade « N , par cette onction sainte, que le Seigneur, en sa grande bonté, vous réconforte par la grâce de l'Esprit Saint ; ainsi, vous ayant libéré de tous péchés, qu'il vous sauve et vous relève.» Au chrétien dans l 'épreuve, il donne la grâce spéciale qui lui permettra d'être associé à la passion et l'agonie du Christ jusqu'au dernier combat avec la mort.

La mort et la mort chrétienne

Autrefois, lors de l’imposition des Cendres, le Mercredi des Cendres, le prêtre disait : " Souviens-toi que tu es poussière et que tu retourneras en poussière. " Voici une réflexion sur la mort et la mort chrétienne.
    Dans le Nouveau Testament, Jésus nie que Dieu soit responsable de la mort.  Il n’y a pas de complicité entre Dieu et la mort, sinon Jésus ne pourrait que s’incliner devant elle. Or Jésus ne transige pas avec la mort : il l’affronte. Tout au long de sa vie il s’engage contre le malheur et la souffrance ; cela devrait suffire à prouver que mort et malheur ne viennent pas de Dieu et à nous faire cesser de les lui imputer.
Quand Jésus redonne vie à quelques personnes, il ne supprime pas la mort, mais il manifeste qu’elle n’est pas du monde de Dieu. Quand le livre de l’Apocalypse nous parle du monde de Dieu, il dit " de mort il n’y en aura plus. "
Saint Paul nous dit : " C’est en Christ, que tous revivront…Le dernier ennemi qu’il détruira, c’est la mort. " (1 Corinthiens 15, 22-26).
 L’épisode du fils de la veuve de Naïm nous éclaire sur la façon dont Dieu se situe par rapport à la mort. L’Évangile nous dit : " En la voyant, le Seigneur fut saisi de pitié pour elle. " (Luc 7, 13). Il rend l’enfant à sa mère et la mère revit. Quand la mort de nos proches nous ôte le goût de vivre, Jésus manifeste que, en nous voyant, Dieu est pris de compassion.
 Jésus ne nie pas la mort, la douleur, le mal. Il nie que Dieu en soit l’auteur, le gérant, la source. Dieu est source de vie, il est le Dieu des vivants.
La Bible regarde la mort en face, elle la prend en compte comme une nécessité de notre état terrestre : elle nous incite à prendre la mesure de nos limites, à percevoir notre finitude, notre désir de puissance. Paul nous dit : " Quand viendra la fin, le Christ remettra toute royauté à Dieu, après avoir détruit toute domination, autorité et puissance. " Ce sont aussi des ennemis à détruire.
La foi chrétienne se fonde sur un Dieu qui a assumé l’angoisse devant la mort. Et c’est pourquoi, nous dit saint Paul, nous n’avons pas un Sauveur incapable de compatir à nos souffrances . Ceux qui nous ont transmis les écrits évangéliques n’ont pas gommé le passage de la croix et l’angoisse du Fils de Dieu vivant une mort d’homme, une mort dramatique, violente, prématurée.
La mort est un mystère, mais elle n’est pas le verdict d’un Dieu écrasant. La Bible ne l’explique pas, mais la place à l’horizon de toute vie, comme un rappel des limites de notre condition humaine : nous ne sommes pas tout-puissants, mais un amour accompagne nos limites et nos fragilités. Aller chaque jour, à chaque instant, de la mort à la vie, tel est le chemin de Dieu.
La mort serait-elle la conséquence du péché ?
Remarquons que dans le Nouveau Testament, la mort a toujours deux sens bien différents :
D’un côté, c’est la fin du chemin terrestre.
D’un autre côté, c’ est la vie coupée de Dieu, centrée sur soi, qui pervertit la relation à Dieu et autres par l’égoïsme, l’orgueil, le désir de domination.
Pensons au fils prodigue : " Mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie. " (Luc 15,24). Et dans la lettre de Jean : " Parce que nous aimons nos frères, nous savons que nous sommes passés de la mort à la vie. Celui qui n’aime pas reste dans la mort. " (1 Jean 3,14)
Oui le péché engendre bien la mort, quand la vie tourne à vide sur soi même, suinte l’égoïsme, la peur, la haine de l’autre…La mort ne frappe pas seulement notre vie terrestre, elle menace notre vie plus dangereusement encore et nous tue par le mensonge, l’hypocrisie, la convoitise, la violence…Vouloir réussir à tout prix, au mépris des autres, c’est mourir.
Le défi que lance toute la Bible c’ est "Vivez une vie ouverte à Dieu et aux autres". Depuis la Pâque du Christ, la mort est vaincue et avec Lui, nous pouvons chaque jour passer de la mort à la vie, une vie qui ne finit pas avec la mort corporelle, d’où son nom de vie éternelle qui pétrit déjà nos jours."Celui qui écoute ma parole et croit au Père qui m’a envoyé, celui-là obtient la vie éternelle." (Jean 5, 24) " Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle. (Jean 6, 54)

    Marie-Dominique TREMEAU